14/03/2011

voyage


Après-demain, je pars en voyage, et comme à chaque fois que je quitte ma routine, je regarde la vanité de ce qui fait mon quotidien, mes habitudes et ce qui a au fond si peu de poids. Le voyage me délivre de quelque chose : les obligations, les courriels, les appels, les courses, les horaires respectés, tout ce qui fait que je suis moi, tout ce qui me donne une identité disparaît soudain. J’abandonne le « je suis occupée » ridicule et m’abandonne au départ ; je deviens inessentielle, libre.

Quand je prends l’avion, le voyage me fait décoller de moi-même, il bouleverse ma gravité ; du coup, je suis légère. Dans un premier temps, je ne peux m’empêcher de regarder avec compassion celle que je suis l’année entière ; je contemple avec tristesse la personne qui croit dans la nécessité de lutter, de se battre pour des choses vaines. Le voyage fait s’écrouler mon monde, tout ce château de cartes que je prends au jour le jour pour la raison de l’existence. Juste avant de passer la porte de sécurité, j’ai honte de m’être accrochée à des bêtises, d’avoir pleuré sur des riens, d’avoir cru à des complots du sort et de m’être adonnée à des méchancetés..  pour survivre. Il me semble que partir en voyage c’est comme envisager un peu la mort, l’accidentel, et être prêt à accepter que nos vies sont essentiellement simples ; que nous affairer à les meubler de toutes sortes de meubles tient du transitoire, d’une attachante vanité. Entre le voyage et la mort, il y a quelque chose de poignant : l’accidentel que nous tentons de repousser sous une montagne de choses à faire.

C’est quand je suis ailleurs, en voyage, que je croise l’exaltation d’être une autre, de ne plus être moi. Il y a aussi de ces moments où il m’arrive de ne pas me reconnaître, de me surprendre, de m’aimer. Si avant de partir, j’ai un nœud d’angoisse jusqu'aux larmes, dans le taxi ou dans la voiture, je me retrouve telle que je ne me suis pas connue et je suis joyeuse de tout sacrifier pour un jour ou une semaine de liberté, d’insouciance.

Pourtant, à ce voyage, je vais penser deux fois. Les catastrophes d’une partie du monde me serrent le cœur et rendent encore plus vains mes soucis, mes envies de partir..

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