20/12/2010

susan collett : artiste plasticienne

Toronto sous la neige existe au ralenti. Elle devient soudain la ville de la lenteur. Et c’est bon et doux et nouveau de rencontrer autrement cet espace où d’habitude tout se déroule à une vitesse intimidante. Les pas dans la neige encore poudreuse, je joue à imaginer que dans des foyers au coin du feu, dans des ateliers d’artistes, la vie et le travail se poursuivent. Des heures et des minutes s’écoulent mais rien de mal en tout cela, car on le sait : des rituels, des gestes et des mouvements quotidiens donnent de l’essence et du sens à l’existence.

Une création qui interroge les sens du monde environnant, je l’ai vue clair dans le studio de l’artiste plasticienne Susan Collett. Le studio donc, lieu mystérieux, porte l’empreinte de l’artiste, une présence attachante par sa simplicité. Et ce ne fut pas rien de l’entendre parler d'art, de son désir de penser la vie en mouvement, de son travail sur la lumière et l’ombre, sur les limites de l’extérieur et de l’intérieur, sur les espaces qui tiennent et qui sont troués. Et aussi, de palper les tensions entre la fragilité et la solidité, entre ce qui passe et ce qui reste...


oeuvres de Susan Collett (voir son site web)

Collett travaille l’argile et le cuivre, la porcelaine et l’acier. Elle fait aussi des gravures et monte des installations. Les choix des matériaux, ainsi que les thèmes des expositions semblent intégrer le rapport entre forces et médiums opposés : le liquide et le solide, l’eau et la matière, les éléments de la nature, la clôture et l’ouverture, l’ancien et le moderne. Des titres de séries comme : Impluvium (terme latin qui indique un large bassin situé dans le sol de l’atrium de la maison romaine, destiné à collecter les eaux de pluie), Labyrinthe, Tapis volant en sont la preuve.

Un aspect qui retient d’abord mon regard est le travail avec la lumière et le mouvement. D’une part, les formes spiralées et ondoyantes que l’artiste crée donnent à penser le jeu entre la stabilité et la possibilité de tourner autour d’un axe ; l’immobilité et la fuite, le point et la spirale. Ces formes qui font figure de vases à fleurs ou de coquillages géants, sont ouvertes vers le haut ; elles tendent vers le ciel, vers le soleil, s’ouvrent à la lumière. D’autre part, la pleine lumière et l’ombre en tandem donnent de la présence à ces œuvres construites de matière pleine et avec des perforations. Les rayons d'air et de lumière percent l’argile ou la porcelaine, éclatent la surface lisse et l’ouvrent à d’autres horizons et interprétations.

Chez Collett, entre le ludique et la pensée, se glisse la métaphore filée qui dit l’impossibilité de retenir la lumière ou l’eau ou l’air ; une interrogation sur la nature glissante des éléments, car, on le voit, c’est incongru de poser/imposer des frontières, délimiter des milieux, des matières. La transgression paraît inhérente. Pour sa part, l’artiste reconnaît vouloir explorer les différents plateaux de l’existence humaine (life’s layers) et l'obsession de l'homme à (re)tenir trop, tentative éternellement vouée à l’échec. Mais cette épreuve est aussi salvatrice, car catalyseur du recommencement, donc de l'envie de travailler et de chercher par-delà le rituel répétitif d’un Sisyphe.

Bref, les créations de Susan Collett sont porteuses d'une grâce et d'une beauté. Dans des explorations de la nature ou dans des formes abstraites, c’est une certaine sensibilité de l’approche et de la réalisation qui retient le regard. Ainsi est-il promis que je reviendrai vers ces ouvres qui sont merveilleusement présentées sur le site web de l’artiste

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