J’écris « beau », ou plutôt je
pense que « c’est beau »… et quelque chose m’échappe, me fuit, se
dérobe à ma parole, comme si j’avais voulu fixer ce qui est plus grand que moi.
Je marche dans une salle de Winnipeg Art Gallery dont les murs sont couverts de
tableaux immenses de Stephen Hutchings, peintre canadien contemporain. Les paysages en tons de brun, de vert foncé et d'ocre dégagent une ambiance mystérieuse, de flottement ; je vois
l’orage descendre. De proche et de loin, je me dis que ces tableaux expriment
assez bien « l’identité » du peintre d'Ottawa, qui choisit de mettre
la nature au centre de son projet ; cette nature à perte de vue que
j’imagine parfois quand je prononce le mot Ontario. L’exposition s’intitule Landscapes for the End of Time, et en
lisant l'introduction du catalogue, j’apprends que l’intention de Hutchings dans ce projet était de mener le visiteur à réfléchir à « l’homme face à
l’éternité de la nature ». Comment vivre avec la conscience qu’on est
mortel et que la nature qui nous entoure nous survivra ? Par ailleurs, il n’y a
pas d’homme ou d’animal dans ses tableaux, comme si l’artiste ne souhaitait pas
« mélanger » les deux univers. Après tout, ce qu'il voudrait peut-être nous transmettre est quelque chose comme : « oui, la nature m’occupe et
occupe toute la place dans mes toiles, mais de pouvoir la peindre et d’avoir la
satisfaction de réussir, me permet de m’approcher et de goûter un grain d’éternité ».
Quant
à moi, visiteuse, j’ajoute juste que ses tableaux ne m’ont pas fait
regretter que je suis femme, donc être humain, et que la nature est plus grande que moi. Sans plus tarder pour réfléchir, j'ai simplement eu envie de sortir, d'imaginer cette nature sauvage en ville... tant qu'il faisait encore du soleil.
Landscapes from the End of Time, WAG
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