Étaler mes citations, mes notes que
je garde dans un petit cahier à couverture verte cartonnée :
« Quand tu seras devenu ce que ta mère a
dit, ne nous oublie pas. Tu sais, Romain, les gens comme nous sont toujours
menacés, surtout par les temps qui courent. Et puis nous sommes dans un pays où
on ne nous aime pas beaucoup… Je ne suis pas sûr que la mère n’ait pas vu trop
grand, mais si un jour tu deviens écrivain, que tu as accès à des journaux, ce
sera à toi de garder notre mémoire. Les mots servent à cela, à empêcher que les
hommes s’effacent complètement.
Écris des textes qui donnent la parole à ceux
que tu as connus. Ne dis pas forcément les choses comme elles se sont passées,
mais transforme-les en légendes, et trouve le ton de voix qu’il faut pour les
raconter. Ou alors, cite les noms, mais précise bien où nous habitions. Pour moi,
contente-toi de leur dire ‘Au no16 de la rue Grande Pohulawska à Wilno,
habitait un certain M. Piekielny’, et cela suffira ». (Romain
Gary cité par Pierre Bayard, Il était deux fois Romain Gary, Paris, PUF,
1990, p. 123).
Écrire,
témoigner mais faire attention. Faire attention. Redonner vie à ces gens, à ces reliques, les
sortir de moi, mais comment ?
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