30/10/2010

the andersen project


La sagesse populaire nous rappelle que le monde est une scène sur laquelle interviennent comme personnages actifs des hommes, des histoires, des contes de fées, des récits refoulés… On pourrait dire que le message de Robert Lepage dans le brillant spectacle The Andersen Project qui se joue à Toronto jusqu’à demain, c’est de nous faire penser à la magie du monde comme mise en scène, à savoir un spectacle magique où s’imbriquent des fils narratifs multiples pour créer un univers envoûtant et fort intéressant.

Le pièce écrite par Lepage est délicieusement joué par un seul acteur, le talentueux Yves Jacques qui tient avec succès trois rôles : Frédéric, le musicien canadien albinos débarqué à Paris pour écrire un libretto pour un projet à l’Opéra Garnier d’après un texte d’Andersen ; Arnaud, l’administrateur de l’opéra, un drôle d’obsédé sexuel, et Rashid, un immigrant marocain, portier d’un peep show. Quelque chose de bouleversant lie ces personnages et donne cohérence au projet : le désir de laisser une empreinte par un travail créatif, l’envie de compter pour les autres, de se faire reconnaître dans un pays étranger, bref de s’intégrer. Et dans cette lutte, bien entendu, la frustration de pas vraiment parvenir ; mais essayer, de pas cesser de prendre des risques, faire des efforts, donc s’embarquer dans des scènes toutes rigolotes ou fort graves. Ainsi est-il des efforts de Frédéric à impressionner ses partenaires de projet à une réunion à Copenhague, efforts qui se transforment en un délirant dialogue de sourds où personne n’entend personne et on éclate de rire à dénuer les sens des mots, à jouer avec des nuances sexuelles pour enfin tirer la conclusion qu’il vaut mieux se mettre à écrire le script demandé et cesser de pérorer.

Yves Jacques, Opéra Garnier

Frédéric se met donc à écrire. Pour le public, c’est l’aura de la magie qui descend sur scène. Je n’ai pas tort de dire que Lepage est un maître des effets visuels, car les espaces virtuels en trois dimensions qu’il crée sont merveilleux. Avec son personnage, on a le sentiment réel de montrer les escaliers de l’Opéra, de prendre le métro aux Invalides, ensuite, de faire une promenade dans le Paris de l’Exposition Universelle de 1889 ou une visite rapide au Musée Andersen de Copenhague. Frédéric écrit écrit et il réussit à livrer le libretto d’une production intitulée The Dryad. La dryade est un être d’air et de rêverie, la nymphe d’un arbre qui partage avec les personnages la maudite envie de connaître et de se faire connaître à Paris. C’est ainsi qu’elle sacrifie une vie entière dans la forêt pour une journée à Paris. Elle y arrive mais sous peu, l’ombre de la déception est inévitable.

Yves Jacques in The Andersen Project

Lepage manie avec finesse les passages d’un fil narratif à l’autre, d’un personnage à l’autre, du monde public à l’univers intime : on entend Arnaud parler anglais avec un drôle d’accent avec ses partenaires danois, pour le voir ensuite chez lui, raconter en français à sa petite fille la nouvelle L’Ombre d’Andersen et transformer la lampe de chevet en spectacle de marionnettes. Le passage n’est point abrupt, la magie pas interrompue. Dans les ondulations de la voix du personnage, on aperçoit les poupées russes : se dévoile une et encore une, il reste une petite. Du moins, c’est l’impression de mises en abyme infinies que j’ai eue. Combien de fois pendant les quatre-vingt-dix minutes du spectacle n’ai-je pas éprouvé des sursauts d’éblouissement ? Bref, c’était surprenant, émouvant. J’ai adoré et ne crois pas avoir été la seule.

L’art de Lepage – dont le nom tient peut-être dans des pages de créativité – se fait sentir aussi dans la subtilité avec laquelle il sait alléger l’histoire par des répliques humoristiques. Tout y passe : l’immigration, les grèves des Français, les Canadiens qui se font souvent larguer par les Américains… Si vous croyiez que ces histoires imbriquées allaient quelque peu vous étouffer, Lepage arrive à point avec une blague ou une allusion marante sur le comportement des animaux et des humains, sur le désir, le sexe. Tombe à pic une séance chez le psy pour chiens qui semble soulager plutôt l’angoisse du maître pour que le public s’esclaffe. Ou voyons encore cette autre scène rigolote où Frédéric, après avoir avalé deux capsules destinées au chien qu’il prit en garde, s’évade dans une danse folle et chante à tue-tête un remix de Sweet Surrender de Sarah McLachlan.

S’il est vrai que le rire contribue au succès d’un spectacle, la bonne créativité aussi. Eliminer le rire, ce serait une manière de refuser la créativité, de ne pas la laisser passer ; ce serait nier quelque chose de notre humanité et nous transformer en robots… but qui ça et là, dans une journée, dans une université, semble presque avoir été atteint. Lorsqu’on observe certains étudiants, on a l’impression qu’ils ne rient de rien… et cela fait froid dans le dos. N’est-ce pas un sujet digne de réflexion ? Ne faudrait-il pas les encourager à se laisser aller au spectacle, à la pensée vivante ? Avoir un projet, même s’ils n’ont plus le temps de voir The Anderson Project ; devoir oblige pour tous en deuxième année : « Je ris de… » .

24/10/2010

promesse Gary

« C’est fini. La plage de Big Sur est vide, et je demeure couché sur le sable, à l’endroit même où je suis tombé. La brume marine adoucit les choses ; à l’horizon, pas un mât ; sur un rocher, devant moi, des milliers d’oiseaux ; sur un autre, une famille de phoques : le père émerge inlassablement des flots, un poisson dans la gueule, luisant et dévoué. Les hirondelles de mer atterrissent parfois si près, que je retiens mon souffle et que mon vieux besoin s’éveille et remue en moi : encore un peu, et elles vont se poser sur mon visage, se blottir dans mon cou et dans mes bras, me recouvrir tout entier…. A quarante-quatre ans, j’en suis encore à rêver de quelque tendresse essentielle. Il y a si longtemps que je suis étendu sans bouger sur la plage que les pélicans et les cormorans ont fini par former un cercle autour de moi et, tout à l’heure, un phoque s’est laissé porter par les vagues jusqu’à mes pieds. Il est resté là, un long moment, à me regarder, dressé sur ses nageoires, et puis il est retourné à l’Océan. Je lui ai souri, mais il est resté là, grave et un peu triste, comme s’il savait ». (Romain Gary, La promesse de l’aube, p. 13)

Ces lignes en ouverture de La promesse de l’aube laissent rêveur. Elles font penser à l’homme Gary et à son œuvre. A imaginer le phoque porté par les vagues, on se demande : qu’est-ce qu’il savait ? Pouvait-il savoir ? Comment ?

La plage de Big Sur (sur la côte de la Californie)












C’est la question que pose cette semaine Raphaël Enthoven sur France Culture dans Les nouveaux chemins de la connaissance, dans une série de cinq émissions qui parlent de Gary. Ecrivains, critiques, journalistes invités semblent s’accorder qu’il est souvent infranchissable, le gouffre qui sépare un être drôle, aimant la vie, de ceux qui le regardent ou le lisent, et il faudrait mille et mille mots pour raconter l’étendue de l’effarement : parler de cette béance, de la fragilité bouleversante d’un être seul malgré la compagnie, parler encore de l’être multiple, de l’ambiguïté et du mensonge ; raconter l’insondable mystère de l’humain, dire que l’on est dissemblable de l’image qui s’imprime sur les rétines des gens, voici où s’entament les dialogues.

L’étrange avec Gary, c’est que l’homme et l’œuvre sont caméléoniques ; la métaphore du caméléon qui crève sur le plaid écossais, cette histoire qui apparaît si souvent dans ses livres est la métaphore de sa vie même, cette vie qu’il n’a eue de cesse de réparer et de renouveler dans la littérature, mais qui un jour en décembre 1980, se coupa dans un troublant suicide.  Mille et mille mots nous manquent pour savoir qui fut vraiment Gary l’écrivain et l’homme. Ses textes s’étalent là comme un grand livre des secrets, fantasmes et aveux, un coffre de trésors qu’il ne faudrait pas abandonner. Son écriture dit la lutte ardue de quelqu’un qui aima la vie, qui eut de grands moments d’espoir et d’anticipation, mais aussi de vide sidéral.

A écouter Enthoven et ses invités, on a envie de redécouvrir Gary, de lire, d’entendre et peut-être de saisir un peu plus le narrateur, le personnage, l’auteur qui à la fin de La promesse de l’aube prononce « j’ai vécu », tandis que sur la même plage du début : « Les phoques se sont tus sur les rochers, et je reste là, les yeux fermés, en souriant, et je m’imagine que l’un d'eux va s’approcher tout doucement de moi et que je vais soudain sentir contre ma joue ou dans le creux de l’épaule un museau affectueux » (p. 391).

Le début rencontre la fin, serpent qui mord sa queue. Encore et encore, dans des mots poétiques, Gary nous fait passer ce message troublant : il n’y a pas assez d’amour ; il y a de la place pour aimer ; on n’a pas assez aimé..

22/10/2010

cruel réel

Rituel. Entre lundi où le procès de Russel Williams a commencé à Belleville en Ontario et jeudi où le juge prononça : ‘two concurrent life sentences for former commander, one of the most despicable killers in Canadian history’, les Globe and Mail et Toronto Star n’ont eu de cesse à révéler l’enfer qu’ont vécu Marie-France Cormeau, 37 ans, et Jessica Lloyd, 27, les deux femmes mutilées et tuées par Williams. Quatre jours de roman-vérité qui ont fait le tour du pays, des stations de radio et des antennes télé ; quatre jours qui ont semé l’horreur et la consternation. Entre dégoût, dépit et révolte, j’ai entendu des pleurs, des questions, des contradictions. Tout cela culminant dans le choc ; le choc et l’incompréhension : pourquoi ? Comment la maladie mentale passe dans les rangs supérieurs d’une base militaire aérienne à Trenton ? Ou encore, ce meurtrier en personne avait-il une fois piloté l’avion qui conduisait la Reine Elizabeth au Canada ?

Le secret, le meurtre, les menaces donc vivent parmi nous. 

Aujourd'hui, le Globe and Mail publie la sentence prononcée par le juge : There’s a saying we’ve all used…nothing surprises me anymore. That adage has no meaning here… The depth of the depravity demonstrated by Russel Williams has no equal. One suspects that he has contained for most of his adult life sexual desires and fetishes; however, in 2007, these inner thoughts began to control his private actions, pushing him deeper and deeper into criminal behaviour which culminated in the brutal and senseless murder of two innocents (News A7).

Ces lignes résonnent. Elles font écho au coeur du tribunal et vont encore loin loin, et pour longtemps. 


Me revient à l’esprit le livre de Truman Capote, De sang-froid, sorti en 1966, avec un extraordinaire retentissement aux Etats-Unis et pas seulement. Dans le premier numéro du Magazine littéraire en 1966, le jeune Le Clézio, alors âgé de 26 ans, parle de ce récit. S’emparant d’un fait divers atroce ayant défrayé la cronique d’une petite ville du Kansas en 1959, Le Clézio tente de saisir l’écriture de Capote qui, dit-il : « a exploré avec tout son corps et toute son âme un tourbillon, une action en marche. Il a été à la fois caméra et magnétophone, et, mieux qu'aucun instrument de mesure, il a suivi le courant d'une aventure, il y a participé, il s'y est trouvé compromis, impliqué. Il a été meurtri, il a été passionné, il a souffert et vécu chaque minute l'histoire qu'il voulait écrire ». Je me souviens aussi : l'enquête et l'écriture de ce livre d'un genre nouveau, roman de non-fiction, basé sur des faits réels et des témoignages des vrais protagonistes du drame, devient en 2006 un film-phénomène qui a valu à Philip Seymour Hoffman un oscar du meilleur acteur pour sa prestation dans le role principal.

Ces faits, vous le direz aussi, donnent pleinement à penser le rapport de la création au réel ; le lien entre fait divers et fiction ou cinéma ; la mise en mots et en images de la réalité. Le rapport à la normalité et la folie. Les comportements et la norme. Et quelle norme ? Myriade de pensées qui cherchent du sens au-delà du non-sens et composent des histoires dans l’espoir, au moins formulé, que la parole et l’écrit et la prise de vue artistique pourront dompter quelque peu la violence, le mal, le leurre et le malheur... 


P.S. Internet va vite, sûr. 
Wikipédia ne laisse pas passer le cas canadien : http://fr.wikipedia.org/wiki/Russell_Williams

16/10/2010

fernando krapp wrote me this letter

Fernando Krapp wrote me this letter is an intriguing title for a play, made even more intriguing by the subtitle: An Attempt at the Truth.

So it was with some sort of curiosity that I entered the theatre. Curious to see what it was to be about, this contemporary German play by Tankred Dorst (born in 1925) based on a novella by Miguel de Unamuno (1864-1936) and translated by the Canadian French director Matthew Jocelyn. In the Globe and Mail, Jocelyn states: “I was at my favourite theatre bookstore in Paris and picked up the script. The first line of the play is: Fernando Krapp wrote me this letter. I thought how great it was to see something so straightforward and so direct, without any prelude, without any preamble.. I love the frankness and the bluntness of Tankred Dorst’s writing”. The script does render the simplicity of the narrative; as for the cast, it is not always at the level. The triangle Julia (Ngozi Paul), Fernando Krapp (Ashley Wright) and the Count (Ryan Hollyman) looks awkward as wife, husband and desired lover, especially when it comes to using such a word as “neurasthenic”, for instance. It looks like the translation doesn’t quite fit the contemporary setting of the play, the no time, no exact location that is meant to illustrate the reality of our days, be it in Europe or North America.

Scene from "Fernando Krapp.."

The play is short, written to be performed in one act, but it is full of emotion, images, ideas that sustain the narrative flow. When a mysterious millionaire writes her a letter calling her the most beautiful girl in the city and vowing to marry her, Julia is deeply upset. They marry, but later when rumours and accusations of infidelity start to come up, both Julia and Fernando must face the facts in an attempt to separate reality from fantasy. The play reveals some bold questions on the human nature: what is the nature of love? And what connection between love and power? What about fidelity and insanity and the couple? The revolving stage is a graceful way of passing from one scene to another, from the city to the countryside. Smooth changes reveal, as words unveil the characters and their struggle between what’s real and delusional.

During Fernando Krapp, I often felt my mind wandering. Fortunately, I was always pulled back by something visually different, either the actors doing clownish moves or by a vibrant piece of music, or by lighting or the stage slowly moving. In spite of my distraction, I was still aware that the play was raising issues about relationships we have with our own emotions, with power, how our lives are constant negotiations between our desire for love and power, and how we are split between conveniences and true feelings. Also, how we get involved in situations that are going to reflect our longing and desires and obsessions. And how we can be surprised by the mistakes we make in terms of our choices. All along the play, these were the tensions the characters were facing; tensions that bridged with my own. In fact, I like the metaphor of theatre as dialogue, some kind of bridge between artists and the public. Things happen, something is going on on stage and in the heads of the people in the audience; a string ties them for a short while and incites them to think; in the same time and separately; during the show or afterwards.

I liked the subtitle of the play: an attempt at the truth. It’s the idea of the attempt that got me, this idea that we can never touch upon truth. The truth is always conditioned by our point of view and perception on reality; and this perception is conditioned by desire. And these layers are thought provoking. After all, there are good parts in Fernando Krapp (unlike the crappy.. name.. of the character, that is a bit crappy), funny moments too. I believe I mostly enjoyed the deliciously simplified, direct manner in which different human issues were dealt with. 

11/10/2010

you will meet a tall dark stranger

London will never replace Manhattan in Woody Allen’s affections for movie settings, but it has recently served as the backdrop for You Will Meet a Tall Dark Stranger. Tackling the uncertainties of marriage, aging, jobs, family and children, Allen puts together an uncanny ensemble in which funny bizarre characters are caught in different life crises.

The powerful cast ranges from an aging couple that splits up after forty years of marriage to their daughter’s relationship shaken by strains and stresses, while inevitably, there are some young characters thrown into the mix. The feisty elegant Helena (Gemma Jones) starts seeing a psychic, Cristal, after being abandoned by her husband Alfie (Anthony Hopkins), who has decided to live again his age of thirty-five with an awkward blonde prostitute decades his junior (Lucy Punch). In parallel, the grown daughter Sally (Naomi Watts) dreams of starting a family and opening her own art gallery but stumbles supporting her self-centered American husband Roy (Josh Brolin), who wastes time trying to finish off a novel with little success. His eye soon wanders to a beautiful guitar player (The Slumdog Millionaire’s Freida Pinto) whom he madly falls in love with.

This colourful bizarre concoction moves from comedy to farce and melodrama but most touchingly, Woody Allen shows human follies and weaknesses in a ridiculous but understandable light. He seems to stay in love with his characters in spite of their frequent missteps. And it is not long before the bloom fades from every rose. Allan’s fine ability to show ordinary life situations and be thought-provoking is a marvel to behold.. 


*** watch the trailer

09/10/2010

The Clockmaker

Stephen Massicotte’s The Clockmaker is a subtle reflection on time, memory and love that opens the 40th anniversary season at the Tarragon Theatre in Toronto. By turns unsettling and sweet, this metaphorical mystery and romance has an original tone that sits halfway between Franz Kafka and Frank Capra. The Ontario born playwright brings to stage a fine reflection on what we are and how we feel in regard to love. After all, can we reduce loving to what we choose to remember and what we choose to forget? And how many ways of grasping the dizzy struggle of the clockmaker: “Nothing should be impossible if one is truly an artist”… Christian Goutsis is just great in the role of the clockmaker: his anxiety and humbleness are genuine and heartfelt. He managed to lead me to a place where I was facing my own vulnerabilities and clumsiness and watching the fine line between normality and mental illness. Frieda – a gifted performer too – appears like a split character that puts up with a brutal husband while searching escape in dreaming and fantasies. She playfully enters a love story with Herr Mann, the clockmaker, under the rain smelling fresh bread and perfumes of the park. Their story is out of time and memories..

Scene from The Clockmaker

Towards the end of the play, the bully husband mad with jealousy strangles Frieda and Herr Mann, and afterwards, desperately cries and sinks into madness. Time suddenly stops. With no sad memories of the past, the protagonists meet in the afterlife and seem to remember only what is pleasant. But the miracle is not to last. The big clock starts ticking again: “time is given back to people to live”. However, for Frieda and Herr Mann, eternity begins. Beyond life, they can start over the story and write it once again the way they wish…

Hope is likely to overcome the tragedy of death and madness. At least, this was my feeling when leaving the theatre. The soft laugher of the audience between rounds of applause maybe confirmed it in a way…

A puzzling set of a play if you choose to puzzle yourself for … Thanksgiving.