12/06/2013

le cabinet du psychanalyste


Vous prenez l’ascenseur et vous appuyez sur le chiffre 9. Neuvième étage. Il vous suffirait d’imaginer que vous êtes dans un immeuble d’appartements au centre-ville de Toronto pour vous retrouver devant une porte en chêne derrière laquelle vous attend une personne chère. Mais comme vous êtes de l’autre côté du monde – des névrosés, des incompris, des mélancoliques – vous prenez le couloir dans l’autre sens, vers la droite, en vous disant que ce travail est vraiment une descente aux enfers. Chaque fois, comme s’il s’agissait d’un rituel, vous posez votre regard sur l’ours polaire en pierre blanche qui orne une table au milieu du cabinet. Cet ours vous rappelle un monde ancien, celui des grands-parents qui avaient en eux, semble-t-il, la sagesse de raconter des histoires peuplées de toutes sortes d'animaux grands et forts. C’était aussi un monde où les femmes et les hommes avaient ce qu’il faut pour supporter les douleurs physiques et morales. Ils vivaient lentement et se répétaient quelques phrases simples, comme pour se donner du courage : « Il y a un temps pour travailler et un temps pour s’amuser », « Aide-toi et le ciel t’aidera », « À chaque jour suffit sa peine ». Entrée dans le cabinet, vous accrochez votre manteau sur la porte que vous fermez avec attention. L’été, vous n’avez rien à accrocher. En faisant le moins de bruit possible, vous allez vous assoir dans le fauteuil appuyé contre le mur insonorisé et vous essayez de capter les mots cachés dans les rares murmures de votre psy. Que peut-il bien dire à l’autre qu’il ne vous ait pas dit ? 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire