Il y a quelque chose de changé. C’est
peut-être moi. À force de porter des vêtements achetés à Winnipeg, quelque
chose de la ville est passé d’elle à moi.
Je recommence à rêver les yeux
ouverts. Les souvenirs s’usent et bientôt seront effacés. Les souvenirs s’en
vont et l’espoir s’en vient. Oui, il est possible de rêver.
Je vais à la bibliothèque, consulte
des livres de voyage. Je vais à Budapest, Prague, Vienne, Cluj. Mais je ne vais
pas à Sophia. Et pourquoi pas par la Russie ? Visiter les palais des tzars. Traverser
des frontières. Marcher ailleurs qu’ici, autour de l’avenue Portage, parmi les
ruines d’un quartier qui était un noyau de criminalité il y a une dizaine d’années.
Ici il n’y a pas eu de guerre. Ici, la guerre est à l’intérieur des Autochtones
qui ont mal vécu. Mais bien que blessés, on peut survivre à la guerre. Et
rentrer chez soi. Se regarder dans un miroir et se dire qu’un peu plus loin,
toujours sur l’avenue Portage, à l’autre bout du quartier dévasté, il y a l’Opéra du
Manitoba, et la salle de spectacles Centennial
Hall. Une certaine forme de beauté, et la promesse de soirées culturelles. Aida, l’autre soir était pas mal, non ? Se regarder dans un miroir
donc, et se reconnaître dans cette femme de Winnipeg qui tient votre regard sans
baisser les yeux.
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