J’ai acheté une autre plante. Je la
regarde pousser. Ses feuilles sont comme de petites mains qui s’ouvrent,
délicates vers le ciel. Au centre des feuilles, une tige. Une seule. Bien
solide. Bien droite. Comme le tronc d’un petit arbre. C’est une plante qui
grandit vite. Bien déterminée à survivre, à prendre sa place sur la terre.
Dans la fenêtre, juste derrière la plante,
je vois un quartier industriel de Winnipeg. Il a l’air si triste. De temps à
autre, une fumée grise sort du plus haut fourneau. Rien ne semble changer à
l’horizon. De longues années, et le décor reste le même. Sans doute vaut-il
mieux rester immobile que de tourner sans cesse autour d’une image du passé.
Moi, je passe de longues heures à rien
faire. Cet état d’apathie n’est pas désagréable une fois qu’on a dépassé
l’ennui. Je reste immobile et j’imagine que je suis une femme de pierre. Une
statue parmi les plantes dans un jardin anglais ; dans Leo Mol Sculpture Garden au parc Assiniboine.
Dans une librairie de livres anciens et
d’occasion, j’ai trouvé un album de photos de statues. Une idée m’est
venue : si je pouvais découper ces images, je ferais un collage où je
mettrais tout en bas, les femmes couchées, mortes et blessées. En haut, celles
qui pleurent et celles qui supplient à genoux. À gauche, les femmes candides ; assises. Au centre, les déesses, les
muses, les souveraines. Bien droites, debout. Brandissant un drapeau, une arme,
une tête de saint.
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