09/12/2012

décembre


Retour à Ottawa, silencieuse et décorée de fête d’hiver. Aujourd’hui, j’ai percé le secret du claquement qui vous accompagne quand vous marchez dans les rues de cette ville. Le vent qui agite les drapeaux fait bouger des anneaux métalliques fixés en haut des poteaux alignés sur le trottoir. La ville claque et clignote, pavoisée de petites lumières bleues et blanches. Vers 17 heures, à la tombée du soir, vous avez l’impression qu’il est déjà tard. Beaucoup de circulation comme pour un événement spécial, mais au fond, ce n’est que l’heure de pointe.

S’il est vrai qu’il ne nous arrive que ce qui nous ressemble, je dois me reconnaître dans l’absurdité de certaines situations – de surcroît, dans une absurdité que je crée moi-même, remplie de ridicule. L’aéroport du centre-ville de Toronto, au premier étage. Salle d’attente assez petite, grands écrans de télé, échos retentissants qui se heurtent aux murs vitrés. Une masse de gens sans visages. Différente de la masse que j’avais vue quelques jours auparavant dans la salle d’attente de l’aéroport de Winnipeg. Ici, la masse d’un peuple pressé, penché sur des journaux ou des I-pads ; un aéroport pour des hommes (et femmes) d’affaires. J’ai l’impression de me trouver au milieu de secrets énigmatiques, d’un flot ininterrompu de signes bien maîtrisés dont je ne comprends pas le sens et dont je suis de toute manière exclue ; du moins, c’est le sentiment que j’ai.

Vendredi soir à Ottawa au CNA, Le Grand Cahier, pièce basée sur le roman d’Agota Kristof, dans une excellente mise en scène par Catherine Vidal. À la sortie du théâtre, des cars de touristes chinois qui descendent pour regarder les lumières en forme de sapin de Noël du côté du Parlement. Quel contraste entre ce monde de la lenteur aisée, disons du luxe, et l’univers du Grand Cahier qui appelle à l’urgence, où la Seconde Guerre fait rage en Hongrie, en Autiche…

Lisons ce passage sur « L’achat du papier, du cahier et des crayons » :

« Chez Grand Mère, il n’y avait pas de papier, ni de crayon. Nous allons en chercher dans le magasin qui s’appelle ‘Librairie-Papeterie’. Nous choisissons un paquet de papier quadrillé, deux crayons et un grand cahier épais. Nous posons tout cela sur le comptoir face au gros monsieur qui se tient derrière. Nous lui disons :
-       Nous avons besoin de ces objets mais nous n’avons pas d’argent.
Le libraire dit :
-       Comment ? Mais …il faut payer.
Nous répétons :
-       Nous n’avons pas d’argent, mais nous avons absolument besoin de ces objets ».

Entre ces personnages inquiétants et les Chinois, probablement peu inquiets, s’étend la ville ; la nuit où fondent les voix et les pensées.


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